Podcast : Le Jazz sur la Côte d'Azur
Pour comprendre dans quel contexte le jazz est arrivé en France et comment se sont formés les premiers big bands, d’abord un peu d’histoire ! Ensuite, je vous ferai découvrir les villes qui ont donné naissance à de très grands festivals que vous connaissez sans doute…. cerise sur le gâteau, nous aurons la chance d’entendre quelques témoignages de musiciens et experts en la matière. Enfin, nous terminerons notre voyage au cœur du jazz par l’actualité azuréenne, ses petits festivals et autres lieux inattendus emprunts de cette musique unique. L’occasion de parler un peu de la nouvelle scène et des talents en herbe qui assureront la relève…
Alors en route… Parcourons le temps ensemble et voyons comment tout a commencé !
L’Histoire du Jazz
Dès le début de la première guerre mondiale, se créent des liens entre le Jazz et la Côte d’Azur. Les soldats américains et leurs fanfares amènent un rythme nouveau, envoûtant, idéal pour danser et faire la fête dans les villages, les casinos, les hôtels et même les maisons de plaisirs. Le jazz répond à la demande d’une société en pleine mutation, insatisfaite par les formes musicales en place surtout à Paris mais aussi sur la Riviera, fidèle relais artistique du tout-Paris mondain. C’est dans ce contexte, que les premiers jazz-bands font leur apparition et animent la période hivernale, saison touristique par excellence grâce à son doux climat que le monde entier envie.
Très tôt lié au tourisme, le jazz s’épanouit sur la Côte sous la conduite des patrons d’établissements et des municipalités. Au début des années 20, le jazz est une curiosité musicale. Certains le découvrent par exemple lors de thés et galas dansants où l’on enseigne les pas à la mode, quand d’autres noctambules le pratiquent dans leurs folles nuits au dancing. Les jazz-bands gagnent alors du terrain dans le quotidien des azuréens, en accompagnant les films muets, les théâtres et autres attractions. Les Américains envahissent les scènes de la Côte, initiant les curieux à leur langage, se mêlant aux artistes et aux intellectuels qui commencent à les fréquenter.
Joséphine Baker et son charleston amplifient cette fièvre du jazz dans une Revue mythique, un spectacle musical créé en 1925 et adulé par des célébrités comme Picasso, Dufy, Léger ou Mondrian. C’est une catastrophe apprivoisée, ou plutôt un cataclysme sonore comme l’appelait Cocteau qui trouve ici un lien avec la démarche surréaliste. Jusqu’à la seconde guerre mondiale, beaucoup de musiciens noirs américains comme Sidney Bechet fuient leur ghettos pour s’installer en Europe et sur la Côte d’Azur. Ils y trouvent une certaine tolérance et ouverture d’esprit qui leur permet de travailler et d’être considérés comme de véritables artistes, établissant ainsi un pont culturel musical entre le vieux continent et le monde afro-américain.
Dans l’entre-deux-guerres, les premiers disques des américains Louis Armstrong et Duke Ellington font leur apparition en France, apportant des références claires sur les différents styles de jazz. A partir de ce moment, on distingue ainsi le hot jazz, vrai, brut, d’essence noire, avec le straight, beaucoup plus “convenable” pour l’élite de l’époque.
L’orchestre jazz prend alors de l’importance dans la scénographie grâce à Grégor. Symbole même du jazz sur la Côte, celui-ci déplace l’orchestre de la fosse vers la scène en l’imposant comme vedette incontestée.
Avec un zeste d’exentricité propre aux années folles, un parfum d’émancipation et un besoin de modernité lient dorénavant le jazz et la Côte d’Azur. Elle entreprend ainsi avec habileté l’une de ses plus belles mutations, caractérisée par l’émergence de la saison d’été.
Dorénavant le jazz est synonyme de soleil ! D’ailleurs, un petit village du littoral nommé Juan-les-Pins, deviendra la première station balnéaire de la Côte d’Azur, grâce à l’industriel américain Frank Jay Gould. Ce nom vous dit quelque chose ? Bien entendu ! La pinède Gould est l’endroit où se déroule encore le festival Jazz à Juan, mais nous y reviendrons un peu plus tard…
D’ailleurs, à deux pas, se trouve toujours l’exceptionnel Hôtel Belles Rives, qui incarne une partie de cette fabuleuse histoire : une batisse lumineuse acquise par l’écrivain Scott Fitzgerald dans les années folles, puis tranformée en hôtel 5 étoiles. Les plus grands noms du jazz y ont séjourné, les pieds dans l’eau et ont livré sur ses terrasses de mémorables jazz sessions. De nos jours, le piano bar de ce palace hors-normes et le prix littéraire qu’il décerne, portent encore le nom de cet auteur, icône de la période dorée du jazz sur la Côte d’Azur France.
A Cannes aussi le soleil sera la vedette ! En 1931, les directeurs des grands établissements et commerçants décident à l’unanimité de ne plus fermer leurs portes pendant les mois d’été; la « révolution du soleil » est maintenant consommée! Les performances se multiplient : au Palm Beach par exemple, avec Billy Arnold ou Django Reinhardt devant des jet-setters de l’époque tels que André Citroën, le baron de Rothschild, Albert Dubonnet, Gustave Eiffel, ou encore Rex Ingram, le producteur américain des studios de la Victorine à Nice.
Les hôtels et palaces de Cannes ne désemplissent pas durant l’été. Le Carlton et le Gallia, les jeunes Martinez et Miramar, les Montfleury, ou le Beausite cultivent le jazz pour le plaisir des touristes. Le Sporting de la rue des Belges également, spécialisé à l’époque dans le music-hall. Quels magnifiques écrins pour cette musique ! D’ailleurs, un petit conseil, n’hésitez pas à y faire un détour pour les visiter..
Et Nice alors ? Dans cette ville baignée de lumière, de somptueux lieux ont contribué à l’essor du jazz. Parmi eux, le Casino des Variétés, l’Eldorado Casino de la rue Pastorelli, le majestueux Casino de la Jetée construit sur la mer, le Casino municipal de la place Masséna, et bien sûr le Palais de la Méditerrannée, pièce maîtresse de l’Empire Gould… tout est lié n’est-ce pas ? … Totalement re-designé, on peut encore admirer sa façade de nos jours…
Alors oui ! le soleil rythme le jazz ! Tous ces palaces programment jusqu’à trois ou quatre orchestres par saison ! Au Negresco par exemple, qu’on peut encore visiter, ou bien au Majestic (celui de Nice). Mais aussi dans les plages privées comme le Lido, la Grande Bleue, la plage du Ruhl, le Beau Rivage, la Tour Rouge, le Negresco Plage ou bien l’Opéra Plage. Autant de lieux de détente sur la Promenade des Anglais qui perdurent aujourd’hui ! on peut s’y restaurer, s’y baigner ou prendre le soleil en écoutant …du jazz.. et le bruit des vagues, en humant les senteurs de la Méditerranée.
L’histoire continue… la folie Jazz continue, même avec le départ des troupes américaines.. A force de faire des escales régulières dans les ports de Cannes, Vallauris-Golfe Juan et Villefranche sur mer, ils ont propagé le jazz et gravé leur passage dans quelques bars de ces villes !
Ahh.. le jazz des années quarante et son emprise sur les foules.. C’est les débuts du Bop et de la grande parade du jazz….
Jazz par-ci, jazz par-là.. jazz partout en fait.
On pourrait s’y perdre tellement l’Histoire est riche. Et tout cela sur un si petit périmètre, la destination Côte d’Azur France! Alors, pour tenter de suivre cette trainée de poudre, nous allons maintenant nous focaliser sur les grandes villes du littoral qui ont donné ses lettres de noblesse au jazz. Chacune avec leur histoire, mais aussi… leurs grands festivals !!!
Juan-les-Pins… Nice …et enfin Monaco.
Car dès 1948, avant de devenir la terre des festivals de jazz, la Côte d’Azur connaît de multiples tentatives de créations d’événements. Au fil de l’Histoire, se joue un chassé-croisé entre Nice et Juan dans lequel Cannes et Monaco ont aussi leur importance. En 1971 par exemple, le festival Jazz à Juan se délocalisera pendant deux éditions à Nice.
Flashback…
Les grands festivals
Nous sommes en 1960, année de la création du Festival d’Antibes Juan-les-Pins qui tracera les premières lignes des festivals modernes. Tout au long des sixties et dans les décennies suivantes, son succès va devenir le symbole du « phénomène festival ».
Renaud Dumenil a été l’attaché de presse du festival durant près de 30 ans. Auteur de plusieurs ouvrages sur le jazz, Juan les pins, la Côte d’Azur, il nous raconte cette épopée.
C’est une histoire vieille de 60 ans, mais plus encore, parce qu’en définitive, le jazz à Juan c’est depuis les années 20 avec l’arrivée des américains, vous savez qu’en 22, Cole Porter était déjà en vacances ici, au château de la Garoupe, et donc les américains, toute la génération perdue qui venaient, les Hemingway, les Fitzgerald tous ces gens-là étaient déjà là dans la station où ils venaient passer leur vacances et invitaient les Picasso, donc il y a avait déjà beaucoup de Jazz. Puis ça a poussé, poussé, puis un jour il y a eu Sydney Bechet qui était au Vieux Colombier à Paris avec toute la troupe, les Claude Luter, les Juliette Greco, tous ces gens-là, et bien ils sont descendus pour les vacances à un endroit qui s’appelait aussi Le Vieux Colombier, ce qui fait qu’à un moment on a appelé Juans-les-Pins Saint-Germain-les-Pins… Voilà, il s’est installé ici, il a vécu ici, il s’est marié ici, puis il est mort ici en 59. Et dès 59, parce qu’il était adoré de tout le monde, il paradait dans les rues avec ses voitures, ses voitures roses et tout … et donc quand il est mort, la municipalité dès décembre 59, à l’initiative de deux passionnés de musique, a décidé de créer un festival de jazz. En 59 ça a été voté et en 60 le premier festival a ouvert ses portes avec quand même déjà une affiche qui était déjà assez extraordinaire puisqu’il y avait Stéphane Grappelli qui était tout jeune, il y avait pléthore de jeunes musiciens, il y avait Martial Solal qui venait de composer la musique de A bout de souffle, donc un très beau plateau qui avait donc commencé dans un premier temps au Fort Carré et puis qui tout de suite, a déménagé à la Pinède, parce que là il y a avait tout.. Il y avait justement toute cette idée d’Amérique, de Miami, de jazz, de genèse, de sport (…) et puis voilà ça fait maintenant 60 ans qu’il est installé à Juan les Pins.
C’est devenu une institution, mais une institution qui garde bien ses fondamentaux. C’est à dire une variété de programmes, une variété aussi de notoriété, y a des nouveaux.. mais si vous voulez l’état d’esprit, c’est que quand même le Jazz à Juan ça restera toujours dans la Pinède, c’est à dire qu’il y aura toujours une jauge limite, on ne peut pas aller au-delà de 5000 avec des gens debout, et ça restera toujours comme ça, ça ne grandira pas, on ne changera pas de lieu. C’est un petit peu comme l’Olympia quoi : vous êtes installé là, dans les meilleures conditions, vous ne voyez pas les chanteurs derrière un timbre poste, vous les entendez bien bien, de bien près. Et ça, c’est tout un ensemble de choses qu’il faut euh… c’est Marmande je crois dans Le Monde qui disait « Jazz à Juan : le festival le plus élégant d’Europe ». Voilà et cette élégance-là on y tient….
L’élégance dont il parle, se retrouve avec l’évolution récente de Jazz à Juan qui accueille à l’heure actuelle au mois de juillet, dans la mythique Pinède Gould, les plus grandes stars, grâce à une synergie avec la Société des Bains de Mer de Monaco. Une dynamique impulsée par son directeur artistique, Jean René Palaccio et dont le journaliste Robert Yvon nous parle :
Robert YVON :
Le grand changement de ces dernières années, c’est la création. C’est-à-dire que Jean-René Palacio, à mon sens, a carte blanche avec Philippe Baute, le directeur de l’office du tourisme et organisateur du festival. Cette carte blanche lui permet, à travers tous ses contacts et sa passion, à ma connaissance, en tout cas c’est ce qu’il m’expliquait, de diversifier les genres, de trouver de nouveaux talents, et de mélanger les grandes stars avec les artistes de jazz. Ça nous donne, par exemple, Marcus Miller avec Selah Sue, des rencontres un petit peu étonnantes et surprenantes, des créations totales à Juan les Pins, des cartes blanches à Manu Katché… Il apporte une création qu’il avait entamé déjà à l’opéra de Monte-Carlo.
Nice dispose également d’une forte culture jazzistique.. et pour son Festival, le plus ancien au Monde, elle va emprunter un axe de développement différent, plus populaire, sous l’impulsion de différents producteurs. En 1948 et en réponse au très attractif et tout récent festival du film de Cannes, le Comité des Fêtes de la Ville de Nice décide d’organiser un grand festival dont le jazz serait le moteur. Dès lors, le Casino municipal de la Place Masséna accueille les soirées dansantes et l’Opéra de Nice des concerts mémorables. A l’hôtel Negresco, lors d’une jam-session historique, “Satchmo“, alias Louis Armstrong, et son « What a wonderful world » sont célébrés par le président de la République. Ces événements niçois vont révolutionner les modes de diffusion du jazz et inspirer plusieurs grandes métropoles telles que Paris, Lyon ou San Remo et surtout le Festival de Newport créé par George Wein en 54.
Saviez-vous que George Wein est LE grand personnage qui lancera cette dynamique ? Avec Simone Ginibre, il invente La Grande Parade du Jazz dans le cadre idyllique des jardins de Cimiez à Nice : à deux pas du Musée Matisse, dans une oliveraie centenaire bordée d’arènes romaines, trois scènes accueillent les plus grands noms du jazz. Une myriade de musiciens et d’orchestres y jouent en alternance ou en jam sessions. Nice devient une « Louisiane azuréenne » où le jazz se vit en famille, un pan bagna ou une socca à la main, dépassant le cercle des seuls initiés.
Bernard Taride, photographe et véritable mémoire du jazz azuréen s’en souvient avec émotion :
Dès le début… le premier festival de jazz au monde. C’était à Nice. En 48.. et puis après ça a été les parades… la grande parade du jazz avec Georges Wein, Simone Ginibre… Voila ! J’ai suivi tout ça… Georges Wein c’était pas … je le connaissais mais c’était surtout Simone Ginibre qui faisait marcher la parade. La première parade, c’était Jazz traditionnel. Moi j’étais un peu déçu, je me disais oh! Si ça doit être toujours comme ça tous les ans, mais non, après la deuxième ils ont compris, ça a été.. plus contemporain… le jazz actuel quoi… alors que le premier c’était du New-Orleans, tu vois ce genre de trucs… c’était plus du jazz..
Ça a tout de suite été bien la parade.. tout de suite du succès… d’abord pour la musique.. bien que moi c’est pas mon truc cette musique un peu ancienne, mais pour le fait que c’était 3 ou 4 podiums… et puis les restaurants. Les restaurants c’était formidable…. La pizza, la socca…
1994 Le festival change de nom mais pas de formule. Il devient Le Nice Jazz Festival. La ville de Nice délègue son organisation à des producteurs privés jusqu’en 2011, date à laquelle elle reprend les rênes pour revenir à ses premières amours, le centre-ville, dans le magnifique Jardin Albert 1er, qui vit naître le festival en 1948.
Sébastien Vidal, directeur de la radio jazz nationale TSF, programmateur du mythique club de jazz du Caveau des Lombards à Paris est devenu le directeur artistique du Nice Jazz Festival qui a lieu tous les étés, en début juillet. Il nous en dresse un portrait original :
Un festival de jazz en plein centre ville c’est le rêve. Un truc où le jazz est à la fois intégré dans la ville et puis c’est le sujet, un peu le parc d’attractions dont le sujet est le jazz..
donc on peut être super jazz et super pointu sur les nouvelles générations et d’aller chercher des mecs qui sont vraiment à l’avant garde de ce que c’est le jazz, et quand on est Nice Jazz Festival qu’on s’inscrit dans l’histoire de la grande parade, eh bien il faut qu’on soit ça. Et puis c’est quoi les choses qui sont compatibles avec le jazz aujourd’hui mais qui représentent les musiques du vingtième siècle et qui sont inspirées par le jazz. Eh bien on a de la bonne musique actuelle : du Hip-Hop, des musiques afro-américaines, de la soul, du funk, et que tout ça, si on le mélange bien et si on arrive à l’organiser en terme d’horaires et de montée en puissance on peut faire un grand festival très très populaire qui reste hyper jazz et hyper classique … cette espèce d’alchimie qui marche plutôt bien parce qu’au final on a fait de très grand rendez-vous à Nice : Quand on fait Black Eyed Peas, ou Massive Attack et que tout d’un coup il y a 7800 personnes debout, devant le concert. On dit qu’on a réussi quelque chose. Pas d’avoir fait Massive Attack, mais d’avoir drainé 12.000 personnes sur une proposition dans laquelle il y a 6 concerts, dont 5 concerts de jazz super hardcore et Massive Attack et que tout le monde est content.. On a tous dit qu’on a réussi un pari quelque part … de remettre le jazz à sa place, c’est-à-dire une musique populaire, simple et chouette.
Mais dès les années folles, le jazz connaît une autre idylle avec Monaco, un des hauts lieux de l’élégance et du prestige de la Côte d’Azur France. Puis, renouant avec la tradition de tourisme durant la saison d’hiver, la Principauté lance son grand festival en 2006. Sous la gouverne de Jean-René Palaccio, dans le cadre exceptionnel de la salle Garnier, le succès est immédiat.
Gilles Marsan, coordinateur artistique à la SBM, nous évoque cette success story :
Monaco et le jazz il y a eu dans les années 30 des orchestres de jazz, il y a eu Aimé Barelli qui était au Hot de Club de France qui est venu à la SBM, faire un orchestre, gérer un orchestre etc… Et ensuite ponctuellement il y a toujours eu des concerts de jazz même au Sporting , une fois par saison dans les années 80 90, il y avait une programmation jazz qui fonctionnait plus ou moins. Ce qu’a amené Jean René c’est d’avoir structuré tout ça, d’avoir structuré la programmation jazz. On a fait des concerts de jazz au Sporting aussi … au début des années 2000 avec des artistes qui sont venus pendant le Summer Festival et après il a structuré avec la création du Monte Carlo Jazz Festival en 2006.
L’idée de Jean René c’était un peu… Au départ il est parti sur le « Jazz at the Philharmonic » à New York. C’était son idée… Donc Jazz at the Philharmonic et Jazz at The Opera Garnier, dont c’était la base, le prestige, d’avoir du jazz sur une scène lyrique, dans un lieu du 19ème siècle…Il y avait aussi des programmations qui étaient aussi à l’ancien cabaret. Il y avait des programmations… Au tout début du festival de jazz, au Moods etc etc… Et après, effectivement l’orchestre permanent de la Principauté a fait des créations avec Marcus Miller et d’autres.
Visionnaire qui nous a prématurément quitté en 2021, Jean-René Palaccio, a joué un rôle clé aussi bien à Juan-les-Pins qu’à Monaco où il a su faire évoluer les programmations en mêlant des artistes historiques du jazz à ceux des musiques connexes comme la soul, le funk et le hip-hop et a également su imposer des talents émergents aux côtés des grandes stars.
Mais on ne peut pas parler du jazz sur la Côte d’Azur France sans parler de Cannes. Pour l’histoire, il faut remonter à juillet 71, date de création de son festival de jazz. La ville est en pleine effervescence, tout juste sortie du Festival du film où les jeunes Godard et Truffaut ont défrayé la chronique. Les paparazzi déjà sur place guettent l’arrivée des vedettes du jazz comme Dizzy Gillespie, Stan Getz, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan, ou encore le Modern Jazz Quartet, Sidney Bechet, Stéphane Grappelli, Barney Wilen, Martial Solal et bien d’autres .. Ce sera un énorme succès avec six jours de concerts, plus de vingt-cinq heures de jazz retransmises à la radio et à la télévision, une organisation parfaite, des musiciens américains et français ravis et un public qui assiste à des concerts de plus de quatre heures ! Pourtant, ce festival ne sera jamais reconduit.
Depuis 2003 et chaque année au début du mois d’août, le jazz est revenu à Cannes dans un lieu idyllique : la grandiose Villa Domergue, réalisée en 1934 sur un terrain acquis au bas de la Californie par Jean-Gabriel Domergue, très influencé par le style italien. Le peintre conçoit le bâtiment et la décoration dans les moindres détails, tandis que son épouse, sculpteuse, crée les jardins en terrasses, aménagés de bassins et de cascades. C’est d’ailleurs ce même Domergue qui fut le créateur de la première affiche du Festival du Film de Cannes. Ainsi, chaque été, dans ce cadre qui respire l’art et les années 30, la ville de Cannes organise un festival de jazz à taille humaine… comme une synthèse nostalgique de son histoire jazzistique.
Mais sur la Côte d’Azur France, il n’y a pas que le littoral qui a résonné au son de la Note bleue. Ainsi, de 1965 à 70, sur la colline de Saint-Paul-de-Vence, les « Nuits de la Fondation Maeght » ont été durant quelques années un véritable laboratoire pour le jazz le plus pointu. Ne manquez pas de visiter cette fondation unique au monde. Edifiée par Aimé Maeght et son épouse, principaux éditeurs et marchands d’art de l’Europe d’après guerre, cet édifice futuriste fut le fruit de l’amitié qu’ils entretenaient avec les artistes les plus importants du XXe siècle : Mirò, Calder, Léger, Braque, Giacometti, Chagall et bien d’autres. Après des décennies d’absence, le jazz revient à la Fondation Maeght grâce au Festival de Musique de Saint Paul de Vence. Depuis 2021, en juillet, on peut y assister à des soirées musicales folles qui viennent sublimer des expositions d’Art contemporain, des projections et des conférences uniques en Europe. Du Jazz et un cadre sublime… Une expérience rare dont seule la Côte d’Azur a le secret… L’occasion parfaite même pour la découvrir en suivant un itinéraire, telle une partition qui aurait pour notes ses Festivals, des plus grands qui ont fait sa renommée jusqu’aux plus intimistes… De quoi sublimer vos émotions. Poursuivons notre voyage…
Autres lieux du Jazz aujourd’hui
Vous le verrez, le jazz est partout sur la Côte quand l’été arrive ! Car vous l’aurez compris, il n’y a pas que les grandes manifestations !.. De nombreuses villes et villages au charme fou organisent des petits festivals avec convivialité et passion.
Critique de jazz pour la presse locale spécialisée, Gilbert d’Alto nous met l’eau à la bouche.
On peut dire déjà, dans les Alpes-maritimes…un festival qu’on oublie souvent mais qui est très intéressant, c’est le festival Jazz au Château à Cagnes sur Mer. Qui, pendant tous les mois d’été, juillet, août et même jusqu’au début septembre… donne des concerts absolument gratuits sur la place du Château Grimaldi…. Ça c’est un festival qui est vraiment très intéressant…
Il y a ce jeune festival de Peillon aussi, dans l’arrière pays niçois, avec des vedettes comme Richard Galliano, Pierre Bertrand, la chanteuse brésilienne Nina Papa.. ou le grand saxophoniste Baptiste Herbin.
Il ne faut pas oublier un petit festival qui dure peu de temps mais qui est très intéressant, c’est le festival du Broc, au-dessus de Nice, avec des gens comme Keziah Jones par exemple, Marjorie Martinez, Sébastien Machado, pianiste-chanteur etc…
Il y a aussi CoartJazz, à Coaraze, qui est à la fois un festival de musique et de masterclass, puisque tous les musiciens donnent pendant la semaine des cours à leur élèves, ces jeunes jazzmen qui veulent se perfectionner..; et en fin de festival il y a un grand concert qui réunit tous les professeurs… C’est exactement la même chose qui se passe à Saint-Cézaire dans l’arrière pays grassois. St Cézaire là aussi des jazzmen donnent des cours, et se réunissent pour une dernier concert avec par exemple le saxophoniste Manu Carré.
Et bien sûr il y a aussi le festival de Saint-Jean Cap Ferrat, qu’on appelle Saint-Jazz Cap Ferrat et qui a présenté des gens comme Eric Legnini, Youdsoudna, ou le regretté Marc Peillon qui à l’époque s’occupait des destinées du festival.. mais le festival continue toujours avec des musiciens de carrure internationale.
Et si vous passez sur la Côte d’Azur France à l’automne, ne manquez pas le Festival Jazz sous les Bigaradiers du côté de La Gaude, un petit village qui vous fera aimer le moyen-pays niçois et son art de vivre.
Et enfin, ne ratez pas Les Estivales, ce festival créé par Le Conseil Départemental des Alpes Maritimes dont le programme se lit comme une carte. Car grâce à lui, durant toutes les soirées d’été, villes et villages deviennent chacun à leur tour une scène pour des spectacles inoubliables. Une manière originale de découvrir le charme de ce territoire.
En ce qui concerne le Var, le mois de juillet est riche en festivals de jazz : celui de Toulon vous donne rendez-vous gratuitement. Quant à celui de Saint-Raphaël, il a fêté ses 40 ans en 2021. Mais si vous voulez vraiment du dépaysement, partez pour une excursion du côté de Hyères, sur l’île de Porquerolles… son festival de jazz vaut vraiment le détour !!
En août, vous apprécierez certainement d’aller près de Saint-Tropez, dans le petit village provençal de Ramatuelle, pour son festival à la programmation remarquable et très appréciée des jazzmen. Vous pourrez en même temps déguster quelques crus des vignerons, dans le cadre naturel et apaisant des Jardins du Théâtre, durant le festival off.
Cette musique vit encore dans quelques petits clubs du côté de Nice: le Shapko est l’un d’entre eux mais il y a également le Kosma, la galerie Depardieu, et surtout, La cave Romagnan. Ce petit bar de quartier près de la gare est LA référence azuréenne. Les grands noms comme les débutants souhaitent tous s’y produire dans un esprit bop et free comme au plus beau temps du jazz.
Mais savez-vous d’où viennent tous ces jeunes talents ? Probablement du Conservatoire de Nice, sur la colline de Cimiez. Plusieurs classes de jazz forment des jeunes musiciens, qui pour certains brillent déjà sur les scènes du monde entier.
Le niçois André Ceccarelli, figure emblématique de la batterie jazz française y voit beaucoup d’espoir.
Je pense que la Côte d’Azur et Nice en particulier a toujours eu une école du jazz, depuis que je me souvienne… on parlait tout à l’heure de mon père, lui il a commencé un peu avant 45, 44 … et depuis ça n’a pas cessé, il y a eu et il y a toujours une école… Au conservatoire il y a une classe jazz qui est très très performante, mais en dehors de ça, dans l’imaginaire de tous les musiciens de Nice, le mot Jazz a toujours existé… Moi quand j’étais gosse et que j’ai commencé à jouer de la musique, le jazz était très présent, dans les clubs, avec des anciens comme Charles Bellonzi, comme Barney Wilen et plein d’autres…
Et là comme j’ai la chance de jouer avec pas mal de jeunes musiciens, je me rends compte qu’à Nice et particulièrement à Nice, il y a une école du jazz très présente, très prolifique, y en a toujours de plus en plus malgré le peu d’endroits pour jouer, parce qu’effectivement, c’est vrai que le jazz c’est une musique un peu particulière. Il y a quelques clubs, il y en a deux ou trois et quelques bars qui proposent du jazz … mais évidemment ils ne gagnent pas leur vie avec ça, mais malgré tout ça n’enlève pas la passion. Je pense que Nice est une ville passionnée par le jazz. Et par son festival qui perdure..
Vous voulez découvrir d’autres jeunes talents durant votre séjour sur la Côte d’Azur France ? Les Jammin’Juan sont faites pour vous ! Créé par Jazz à Juan, cet événement qui est aussi un marché reconnu se déroule au Palais des congrès de Juan-les-Pins. Il a pour but d’offrir une scène aux artistes émergents du jazz, afin qu’ils se produisent devant des professionnels, des médias et un public passionné de jazz. Sans oublier les Nice Jazz Sessions qui, durant toute l’année voient du jazz programmé par la Ville de Nice dans certaines de ses salles.
De quoi faire vibrer les rues de la Côte d’Azur au quotidien et faire vivre encore et encore l’esprit de cette musique légendaire à travers les temps !…
Conclusion
J’ai pris beaucoup de plaisir à partager avec vous cette histoire d’amour entre le jazz et la Côte d’Azur France et j’espère que vous aurez envie d’en savoir plus.. Quand vous viendrez par ici, vous trouverez le jazz dans les endroits les plus inattendus : à Grasse, par exemple, en vous enivrant d’un parfum baptisé Jazz par Yves Saint-Laurent. Au musée Matisse de Nice également, les couleurs et les formes du jazz vous éblouiront, en voyant combien le maître a été influencé par ce courant musical, quand il créa Jazz, un livre d’art aussi moderne et ludique que la musique qui l’inspira. Le musée Picasso d’Antibes, lui, vous permettra d’admirer les abstractions lyriques de Nicolas de Staël, à l’origine d’une affiche mythique du Jazz à Juan.
Vous voyez… La Côte d’Azur France vivra éternellement au rythme du jazz. Dans cet écrin méditerrannéen, tel le phénix, il renaît de ses cendres pour prendre de nouvelles formes et se réinventer sans fin.
Alors faites le plein de bonnes vibrations sur cette terre de jazz… quant à moi je vous dis au revoir et à très bientôt pour de nouvelles aventures !!
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